Témoignage et service de la Parole
Prédication pour dimanche le 6 octobre 2019 au Temple de Labastide
Evangile : Luc 17, 5 à 10
Prédication : 2 Timothée 1, 7 à 14
Cantiques : Arc-en-Ciel 405, 1-2-3 ; 416, 1-2-3 ; 509, 1-2-3
Spontanés : (AEC) 118, 1 ; 428, 4 ; 475, 2 ; 81, 8 ; 138, 2
L'Évangile d'aujourd'hui est un enseignement de Jésus qui peut nous couper le souffle. Or, puisqu‘il s‘agit d‘ÉVANGILE – il importera à l‘écouter d‘un coeur tout ouvert : Il nous est donné pour nous encourager à notre service et à notre témoignage dans la foi. Écoutons donc l'évangile de Luc au chapitre 17, les versets 5 à 10 :
Les apôtres dirent au Seigneur : Donne-nous plus de foi. Le Seigneur répondit : Si vous aviez de la foi comme une graine de moutarde, vous diriez à ce Sycomore : Déracine-toi et plante-toi dans la mer. Et il vous obéirait. Qui de vous, s'il a un esclave qui laboure ou fait paître les troupeaux, lui dira, quand il rentre des champs : Viens tout de suite te mettre à table ! Ne lui dira-t-il pas au contraire : Prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, jusqu'à ce que j'aie mangé et bu ; après cela, toi aussi, tu pourras manger et boire. Saura-t-il gré à cet esclave d'avoir fait ce qui lui était ordonné ? De même, vous aussi, quand vous aurez fait tout ce qui vous a été ordonné, dites : Nous sommes des esclaves inutiles, nous n'avons fait que ce que nous devions faire.
La lecture d'épître qui nous est proposée pour aujourd'hui est une parole de bénédiction et d'envoi. Adressé à un jeune serviteur de la parole, ellenous concerne toutes et tous, puisque nous sommes, toutes et tous (jeunes ou moins jeunes) appelés à être des serviteurs et témoins de la Parole. Ce mot d’encouragement s'adresse donc à chacune, à chacun de nous, ici. Écoutons au début de la seconde épître à Timothée les versets 7 à 14 :
Ce n'est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d'amour et de sagesse. N'aie donc pas honte du témoignage de notre Seigneur, ni de moi, son prisonnier. Mais souffre avec moi pour la bonne nouvelle, par la puissance de Dieu qui nous a sauvés et nous a adressé un saint appel, non pas selon nos œuvres, mais selon son propre projet, selon la grâce qui nous a été accordée en Jésus-Christ avant les temps éternels – cette grâce qui s'est maintenant manifestée par l‘incarnation de notre Sauveur, Jésus-Christ qui a reduit à rien la mort et mis en lumière la vie et l'impérissable par la bonne nouvelle. C'est pour cette bonne nouvelle que moi j'ai été institué héraut, apôtre et maître. C'est aussi pour cette cause que j'endure ces souffrances ; mais je n'en ai pas honte, car je sais bien en qui j'ai placé ma foi, et je suis persuadé que celui-là a le pouvoir de garder ce qui m'a été confié jusqu'à ce jour-là. Retiens, dans la foi et dans l'amour qui est en Jésus-Christ, le modèle des saintes paroles que tu as entendu de moi. Garde toutes les belles choses qui t'ont été confiées au moyen de l'Esprit saint qui habite en nous.
Bien chers amis,
dernièrement, j’ai été sollicité par des amis (bien engagés dans leur église protestante en Allemagne) de leur donner des nouvelles concernant notre église locale. Nous étions entre amis, j’ai donc pu parler tout ouvertement, sans retenue et à bâtons rompus – c’était l’occasion de sortir certains élements plutôt lourds et douloureux qui pèsent sur mon coeur depuis un moment. Pas la peine de répéter ce qui a dû être dit (pas la peine non plus, bien sûr, de se rassurer du fait que nous avons aussi pu partager quelques nouvelles encourageantes, avec, par exemple, la famille Tosh que notre communauté réformée a pu accompagner, au cours des années passées, sur leur chemin d’intégration bien réussi dans leur pays d’asyle.)
Les amis allemands ont essayé de se mettre dans notre peau, ils ont eu quelques propos encourageants…. Et voici que le lendemain de cet entretien malheureusement lugubre par moments – je me suis plongé dans la préparation de notre culte d’aujourd’hui. J’ai donc été le premier parmi nous… à être surpris de l’épître du jour qui m’a touché bien profondément, en parlant tout droit dans notre situation actuelle, cette situation pas tout à fait facile :
Ce n'est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné,
mais un esprit de force, d'amour et de sagesse !
Eh oui ! Cette épître nous est donnée pour nous encourager, nous aussi, ici et maintenant ! Ne me dites surtout pas que l’auteur, à l’époque, ait eu bien plus de pain sur la planche que nous, aujourd’hui, avec des communautés chrétiennes animées par l’esprit pionnier des débuts, avec des paroissiens plein d’entrain et d’enthousiasme qui n’hésitaient point à mettre les mains à la pâte, et avec un ministre animé par un zèle sacré de se plonger tête avant dans un ministère difficile, mais ô combien épanouissant, sans compter ses heures de service et ses déplacements à faire...
On nous dit aujourd’hui que l’auteur anonyme des deux « épîtres à Timothée » doit avoir vécu dans l’Asie mineure, dans la région d’Ephèse, vers la fin du premier siècle. Il a choisi de mettre son enseignement très actuel dans la bouche de Paul (déjà trépassé à ce moment!), messager sublime de la grâce de l’éternel qui est plus forte que toutes les obscurités si pesantes qui peuvent nous entourer, pour faire accorder à son enseignement l’autorité de ce témoin de l’évangile intrépide qui n’hésitait pas à endurer les pires épreuves dans son parcours missionnaire. En plus, il écrit de telle manière qu’il place ses paroles dans la dernière période de la vie de Paul - où il se trouvait à Rome, en attendant son procès…. et sa mort….
Il en ressort bien clairment en définitive, que vivre une existence dans la foi, ce n’est pas une sinecure, c’est toute autre chose qu’une promenade de dimanche après-midi. C’est, disons-le clairement, un défi qui vaut toute une existence. Et rien de plus beau et de plus essentiel que de témoigner de l’amour de Dieu, incarné dans notre monde incertain et fou, ce monde plein de tensions et de conflits qui – vous ne le contesterez point – a besoin de ce témoignage. Relisez les Actes des Apôtres, relisez les épîtres, et vous vous rendrez compte des problèmes et des difficultés que ces communautés chrétiennes des débuts ont eu à affronter. Vous découvrirez des divisions dans les communautés, vous rencontrerez des conflits et des disputes, vous serez surpris des luttes courageuses contre des enseignements hérétiques et aussi à l’encontre de personnes qui ne cherchaient que de se mettre en védettes elles-mêmes. Vous tomberez sur les dangers qui menaçaient les communautés chrétiennes de l’extérieur, vous deviendrez le témoins de persécutions, de chicanes causées par d’autres groupements réligieux et aussi les autorités publiques – et vous vous mettrez à l’évidence que nous, petite paroisse réformée en Ardèche méridionale, malgré les circonstances pas trop confortables que nous parcourons pour le moment, nous sommes (et je dirais : même avec notre âge moyen avancé, même avec une desserte spirituelle, actuellement un peu… hm hm…) bien mieux placés que nos pères dans la foi de l’époque. Et la seconde épître à Timothée pourra nous reconforter sensiblement, tout en nous montrant que – même dans des circonstances si difficiles et bien plus pesantes que les nôtres, la foi – et aussi l’Esprit de Dieu qui l’anime ! - nous fait découvrir comment ce même Esprit nous est accordé :
Ce n'est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné,
mais un esprit de force, d'amour et de sagesse !
Vous comprendrez bien que cet esprit nous entraîne à nous encourager mutuellement, à serrer les coudes, à nous rappeler entre nous comment l’Éternel est présent parmi nous, comment il nous oriente et fortifie, comment il nous libère et nous inspire à nous rapprocher – pour ne pas nous laisser paralyser par les divisions et les découragements qui – incontestablement ! – existent et risquent de nous lasser.
Retenons bien que cette seconde épître à Timothée sait très bien qu’elle est tout à fait compréhensible, cette résignation qui nous guette. Oui, il existe des moments où nous sommes amenés à une retraite, à nous retirer de tout, à une abstention de toute activité paroissiale. Mais voici que l’Esprit nous pousse dans une toute autre direction :
Ce n'est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné,
mais un esprit de force, d'amour et de sagesse !
Depuis l’époque où l’auteur de ces épîtres pastorales a émis ces encouragements, il y a eu d’innombrables chrétiens qui par leur vie « à contre-courant » ont témoigné comment cet ésprit de force, d’amour et de sagesse pourra toujours à nouveau affermir les coeurs affaiblis et vaincre la peur.
Dernièrmement, j’ai eu l’occasion d’accompagner un groupe fort intéressant. Ce sont des descendants de refugiés huguenots qui ont pu s’intégrer, avec leur foi et avec leur savoir-faire, dans les régions germaniques. Et voici que ces déscendants de huguenots sont venu à Vallon pour découvrir des lieux de mémoire tout près de chez nous et notre patrimoine historique et spritituel. Vous pouvez facilement imaginer que ce n’étaient pas seulement les cultes clandestins dans la Baouma Traouchada ou à la grotte du Ron Baratu que nous avons considéré, la démolition des châteaux de Salavas et de Vallon ou la bataille de Vagnas. Nous avons évoqué, aussi, les souffrances multiples d’innombrables paysans et de petits gens qui étaient obligés de prendre sur eux les conséquences douloureuses des guerres de réligion – et nous avons pensé, aussi, aux efforts de gens comme Jean et Olivier de Serre qui se sont engagés, au nom de leurs églises réformés et au risque de leur vie pour la paix, par exemple au moment de la trêve du château de Laborie...
Et nous n’avons pas oublié non plus, bien sûr, la période du Maquis, les efforts de la Résistance pendant la seconde guerre mondiale, les activités de ces jeunes pleins de courage qui ont pris la relève de nos pères cevenols pendant l’occupation allemande en s’engageant pour les opprimés et persécutés de cette époque.
Il m’était important de mettre un accent très fort sur ces disciples (anonymes pour la grande plupart) qui, à travers les temps, ont toujours à nouveau et dans les circonstances les plus divers, été prêts à « se faire dresser l’oreille pour qu’ils écoutent comme des disciples écoutent » (Esaïe 50,4), qui ont été (et qui sont et qui seront !) prêts à se laisser aborder et toucher par cette Parole qui – presque toujours – nous parvient … à travers des paroles d’hommes...
Vous comprenez bien, bien chers amis, que cette exhortation du début de la seconde épître à Timothée pourra nous rendre sensibles à cette force de l’ésprit mystérieuse et cachée – et pourtant bien réelle que Dieu manifeste toujours à nouveau parmi nous :
Ce n'est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné,
mais un esprit de force, d'amour et de sagesse !
Peut-être vous rappelez-vous de cette expérience extraordinaire par laquelle le maître d’école a su étonner ses élèves : Il avait saupoudré un carton d’une poussière grise, très fine – et tout d’un coup, comme par miracle, cette poudre a commencé par bouger. Elle s’est écartée pour former des lignes, des fins dessins surprenants – pour rendre visible les lignes de force de l’aimant que l’instituteur avait placé sous le carton.
Prenez cette expérience pour une image de ce qu’anime l’ésprit de l’Éternel :
Ce n'est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné,
mais un esprit de force, d'amour et de sagesse !
Cet esprit est totalement invisible – mais il aura toujours à nouveau des effets. Des effets sensibles et visibles ! Toujours à nouveau, des humains se laisseront animer, se feront mettre en route par lui – par la puissance de l’empathie et de l’amour qui va découvrir l’Autre dans l’autre, c’est à dire ce « prochain » que Dieu nous accorde – comme sœur ou frère, comme compagnion de route, pour continuer ensemble, et pour témoigner de sa présence, et aussi, bien sûr, pour collaborer à construire cet édifice qui se compose de ces pierres vivantes… que vous êtes. Amen.
Seigneur éternel, nous te prions aujourd’hui pour tous ceux et toutes celles que tu as appelés à être tes témoins ici, parmi nous.
Donne-nous, donne-leur cet esprit de courage et de force, cet esprit d’amour et de sagesse qui nous permettra de retrouver et de maintenir notre unité dans la foi et dans l’engagement pour ta Parole.
Accorde-nous de retrouver cette cohérence dans la fidélité qui a marqué depuis toujours la région du Pont d’Arc, dans l’écoute de ta Parole et dans le souci vital de ne pas perdre de vue le patrimoine spirituel que nos ancêtres dans la foi nous ont légué.
Nous te prions pour les jeunes qui, hélàs, se sont dispersés, et aussi pour les moins jeunes qui, parfois, ont l’impression d’être abandonnés.
Èveille parmi nous des témoins courageux qui sont prêts à se lancer dans l’engagement pour notre petite communauté – et permets-leur de connaître l’épanouissement d’un service en ton nom et selon ta volonté.
Que ton esprit nous anime, l’esprit de force, d'amour et de sagesse.