Lectures : Proverbes 8, 22 à 31 / Jean 16, 12 à 15

Prédication pour dimanche le 3 juin 2007 au Temple de Vallon (Trinité)
Lectures : Proverbes 8, 22 à 31  /  Jean 16, 12 à 15
Texte :  Romains  5,  1 à 5
Cantiques : Arc-en-Ciel 232, 1-2-3 ; 504, 1-2-3 ;  537, 1-2-4
Spontanés : (AEC) 118, 1 ; 428, 4 ; 475, 2 ; 81, 8 ; 862 ; 875 ; 471,1 ; 138, 2

La première lecture d'aujourd'hui est tirée du livre des proverbes, du florilège de la sagesse du peuple de Dieu. La sagesse s'y présente comme l'enfant privilégiée de Dieu. Elle est l'image même de ce que nous appelons l'esprit de Dieu. Ecoutons au Proverbes 8, les versets 22 à 31 :

Le SEIGNEUR m'a engendrée, prémices de son activité, prélude à ses oeuvres anciennes. J'ai été sacrée depuis toujours, dès les origines, dès les premiers temps de la terre. Quand les abîmes n'étaient pas, j'ai déjà été enfantée, quand n'étaient pas les sources profondes des eaux. Avant que n'aient surgi les montagnes, avant les collines, j'ai été enfantée, alors qu'Il n'avait pas encore fait la terre et les espaces ni l'ensemble des molécules du monde. Quand Il affermit les cieux, moi, j'étais là, quand Il grava un cercle face à l'abîme, quand Il condensa les masses nuageuses en haut et quand les sources de l'abîme montraient leur violence ; quand Il assigna son décret à la mer - et les eaux n'y contreviennent pas - quand Il traça les fondements de la terre. Je fus maître d'œuvre à son côté, objet de ses délices chaque jour, jouant en sa présence en tout temps, jouant dans son univers terrestre ; et je trouve mes délices parmi les hommes.


Dans le dernier discours que Jésus adresse à ses disciples avant sa passion et sa mort, il leur précise que, dorénavant, il sera présent parmi eux à travers son esprit. Ecoutons l'évangile d'aujourd'hui dans Jean 16, 12 à 15. Jésus dit :

J'ai encore bien des choses à vous dire mais vous ne pouvez les porter maintenant ; lorsque viendra l'Esprit de vérité, il vous fera accéder à la vérité tout entière. Car il ne parlera pas de son propre chef, mais il dira ce qu'il entendra et il vous communiquera tout ce qui doit venir. Il me glorifiera car il recevra de ce qui est à moi, et il vous le communiquera. Tout ce que possède mon Père est à moi ; c'est pourquoi j'ai dit qu'il vous communiquera ce qu'il reçoit de moi.


Et l'épître d'aujourd'hui que nous allons méditer ensemble, est un message de l'apôtre Paul, adressé à la communauté chrétienne à Rome. Elle assure que Deu nous donne son esprit qui nous assure la paix avec Dieu. Ecoutons Romains 5, les versets 1 à 5 :

 Ainsi donc, justifiés par la foi, nous sommes en paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ ;     par lui nous avons accès, par la foi, à cette grâce en laquelle nous sommes établis et nous mettons notre orgueil dans l'espérance de la gloire de Dieu. Bien plus, nous mettons notre orgueil dans nos détresses mêmes, sachant que la détresse produit la persévérance, la persévérance la fidélité éprouvée, la fidélité éprouvée l'espérance ; et l'espérance ne trompe pas, car l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint qui nous a été donné.


Bien chers amis,

 aujourd'hui, l'épître aux Romains a la réputation d'être la nourriture théologique la plus dure à croquer. Elle ne peut être comprise et « digérée » qu'à raison d'efforts considérables. Nous ne pouvons que difficilement imaginer que cette épître hautement théologique, avec ses réflexions si denses et ses formulations si précises, ait été aisément comprise par ces premiers auditeurs, par les chrétiens de Rome. Quant à nous, nous avons bien du mal à saisir son message, malgré les commentaires théologiques que nous pouvons consulter.

Or, les romains, à l'époque, avaient un avantage considérable. Je ne pense pas seulement au fait que ce message leur était adressé personnellement. (En effet, vous le savez comme moi : Si un message vous est adressé personnellement, il sera lu avec un intérêt, avec une attention telles, que vous parviendrez à le comprendre bien mieux qu'un texte anonyme, imprimé et publié quelque part...). Mais, en plus, les réflexions de l'apôtre atteignaient les romains au coeur même de la vie très concrète dans laquelle ils se trouvaient. Pour eux, le discours de Paul n'avait rien d'abstrait ou de théorique. Permettez-moi de dessiner, tout brièvement, leur contexte historico-social qui, en effet, peut nous ouvrir un accès inattendu au message de l'apôtre.D'une part les romains étaient animés, en profondeur, par une recherche religieuse et spirituelle. Les gens qui s'étaient réunis dans cette communauté à Rome, vivaient dans un monde de plus en plus insécurisant. À une époque où presque tout semblait s'écrouler. La société et le monde entier semblaient s'approcher de la catastrophe, paraissait pencher vers une transformation imminente, mais incertaine et imprévisible. Voici pourquoi on était donc à la recherche d'un sens, à la quête de repères valables. On était en quête d'orientations susceptibles à encourager les gens à une vie dynamique et audacieuse. Pour eux, le message biblique semblait répondre à cette attente. Ils avaient été surpris de constater que ce message différencié dépassait largement les croyances simplistes et naïves de l'époque, se distanciait agréablement des rites obscures et des  superstitions qui enchantaient les foules...En plus, ils avaient rencontré dans cette communauté chrétienne des compagnons de route animés, poussés, par quelque chose de bouleversant, par des énergies nouvelles. Ils étaient marqués par la rencontre avec un Dieu différent de toutes les imaginations courantes qui étaient visiblement le fruit de désirs et de fantasmes très humains. Les chrétiens connaissaient, appparémment, un Dieu qui ne s'achète ni ne se séduit. Un Dieu fidèle qui aime les humains et qui s'adresse à eux, qui les relève, toutes les fois que nous nous égarons dans ce monde trouble et sans repères solides. Son amour insondable et inconditionnel ne se décourage jamais. A chacun de nos faux pas, il donne une nouvelle chance. Il vient à nous, et comme le plus tendre des pères, il nous suit pas à pas, inquiet et confiant, jusqu'à ce qu'il nous voit nous redresser et nous remettre en marche....Imaginez des personnes qui pendant des années, des décennies, s'étaient perdus dans une recherche vaine et décevante. Des hommes et des femmes qui avaient creusé et médité, qui avaient tout essayé pour trouver des réponses valables à la question du sens, pour arriver à connaître le but de nos vies. Ils avaient compris que la vie humaine ne peut, en définitive, se résumer au seul « boulot, bouffe, bisou ». Mais ils n'avaient trouvé nulle part la paix intérieure, ni des réponses valables qui pouvaient étancher leur soif. Il se peut même qu'ils avaient été prêts à payer cher, à sacrifier beaucoup pour trouver de bons repères. Et malgré tout, ils n'avaient pas pu combler ce vide intérieur qui les tourmentait...Et voici qu'ils découvrent, dans la communauté chrétienne, que l'énigme de l'existence humaine ne pourra jamais se résoudre dans et par nos propres actions, mais seulement dans et par ce que Dieu opère, dans et par son action salutaire à lui. Ils ont saisi que le but, se sens, la valeur de notre existence (ce qu'on appelait, à l'époque, la « justification »), nous sont donnés, offerts, par la grâce de Dieu . La paix, l'épanouissement de la vie ne résulteront donc jamais de nos activités à nous. Ils sont le fruit de la foi. Et la foi, ce n'est pas une certaine technique spirituelle, c'est une grâce, une révélation que Dieu nous accorde, inconditionellement.Voici la source du « shalom », voici l'origine de cette paix qui dépasse toute compréhension, voici la puissance intérieure qui transfigure les humains pour leur permettre de vivre, renouvelés, nés à nouveau. Voici ce qui fait d'eux des chrétiens, un peuple de Dieu en marche vers ce royaume qui vient vers eux, qui leur est donné, par grâce seulement.Tout cela, pour les chrétiens de Rome, ce n'étaient pas que des mots. C'était une réalité très concrète de leur vie de tous les jours. Ils l'ont expérimenté. J'imagine qu'il leur est arrivé de rencontrer des gens en face desquels ils ont compris, au premier abord déjà : Voici des gens qui vivent autrement. Ces gens aux yeux brillants, ces hommes, ces femmes, ces enfants aux fronts clairs, qui, apparemment, ne sont pas paralysés par la peur de la vie, ils sont, tout au contraire, animés par un esprit vivifiant, encourageant, mobilisateur. Dans un monde où tous les échelles éthiques et culturelles se perdaient, où les horizons se refermaient, où toutes les perspectives se brouillaient, ils arrivaient à tenir fermes. Même en face d'insécurités apparentes, même sous des menaces sérieuses et en pleine persécution, ces chrétiens étaient ancrés dans un fond sûr et stable. Pourtant, ils n'étaient ni têtus ni bornés. Ils ne se perdaient pas dans un fanatisme étroit ou un élitisme orgueilleux...On comprend facilement que tous ceux qui les rencontraient, voulaient savoir davantage. Qu'on cherchait à connaître les sources qui alimentaient cette clarté de vie surprenante. Et c'est ainsi qu'on pouvait faire la connaissance non d'une « nouvelle » religion, d'une doctrine spirituelle ou théologique qui disputerait la place aux autres croyances. Ils ont rencontré, de manière bouleversante et inoubliable, ce Dieu qui les a cherché, ce maître de l'univers qui les a crées, et qui leur disait : Je t'aime. J'ai un projet pour et avec toi. J'ai besoin de toi dans mon projet d'amour et de paix pour ce monde que j'aime infiniment...Ils ont compris que Dieu avait besoin d'eux, un peu comme un père qui aime son fils et qui a besoin de lui pour bien gérer ses affaires. Voici ce que ces chrétiens à Rome ont appris, très concrètement, dans et par le baptême chrétien : Tu descendras dans l'eau du baptême, signe de la mort ; tu auras part à la mort du Christ, ton Sauveur, et lorsque tu remonteras de l'eau, tu seras dans une vie nouvelle, tu réaliseras que, dorénavant, tu auras part à son royaume à venir...Il n'est donc pas étonnant que les premiers auditeurs du message de Paul ont si aisément compris ce que l'apôtre leur transmettait :Voci donc, justifiés par la foi, nous sommes en paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ ;     par lui nous avons accès, par la foi, à cette grâce en laquelle nous sommes établis...La fermeté de laquelle nous sommes établis en tant que chrétiens n'est jamais dûe aux traditions sécurisantes, ni à notre piété personnelle, même pas à tout notre savoir, à nos connaissances acquises. Tout est fondé sur ce fait que Dieu nous a touchés avec la dynamique de son royaume à venir - et qui est déjà présent, que nous attendons et que nous anticipons en même temps dans une joie et une gratitude toujours grandissante.Ce royaume de Dieu n'est point de château en Espagne, éloigné de toutes nos réalités. Si j'en parle en termes de « dynamisme », c'est qu'il s'agit d'une réalité qui, quoique caché, est déjà présente pour nous encourager, pour nous dynamiser, pour nous mettre en route, pour faire de nous des témoins de sa présence. Il suffit de ne pas esquiver la réalité, la puissance de cet esprit, de ce mouvement, à l'œuvre dans notre monde, marquant nos vies...La foi, c'est donc incomparablement plus qu'une somme de vérités qu'il faut prendre pour vrai. Et l'espérance, c'est un ancrage dans la promesse de Dieu, donc dans cet avenir de Dieu qui s'annonce, bien au-delà de tout optimisme banal... Pour les chrétiens à Rome, de même que pour Paul, la foi et la paix étaient devenus des dimensions très concrètes et très fiables de leur vie de tous les jours. C'est ainsi qu'ils n'avaient plus besoin d'esquiver la réalité autour d'eux, ou de s'enfuir dans les nuages. Ils sont devenus capables de vivre le présent, dans la joie et dans la souffrance, engagés pour celles et pour ceux qui, peut-être, étaient dans la peine, à l'ombre de la vie...Ils ont donc très concrètement expérimenté ce que Paul leur fait remarquer :sachant que la détresse produit la persévérance, la persévérance la fidélité éprouvée, la fidélité éprouvée l'espérance ; et l'espérance ne trompe pas, car l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint qui nous a été donné.Aujourd'hui encore, vous pouvez rencontrer des gens qui sont marqués par le dynamisme de l'esprit de Dieu. Il en existe plus qu'on ne le pense. Mais parfois il faut être très attentifs pour les découvrir. Ce ne sont jamais des « héros de la foi ». Ce sont des gens comme vous et moi. Des gens qui ont confiance en cet esprit qui les anime et qui les remet en route, toujours à nouveau, dans et par l'amour, dans cet amour - que l'Amour de Dieu suscite en nos cœurs. Amen.

Pardonne, père de tout pardon, que nous arrivions si rarement à réaliser
que tu nous as appelés, que tu nous rends capables de tenir notre place, de jouer notre rôle dans le grand dessein de ton salut.
Ouvre nos yeux et nos coeurs pour que nous regardions vers toi,
pour que nous comptions sur toi qui donnes un sens à notre vie, et du fruit à notre travail.
Oui, nous ne voulons pas nous contenter de nos bonnes intentions.
Nous voulons devenir actifs. C'est ainsi que nous te prions de bien permettre à nos activités de rendre présent ton esprit, de transmettre le message de ta présence parmi nous.
Relie tous les petits signes et activités qui sont faits en ton nom et selon ta volonté, pour en faire un grand courant de l'encouragement et de l'amour,
pour permettre le pardon, la compréhension, la paix - surtout pour toutes celles et tous ceux de nos frères et sœurs qui en ont particulièrment besoin.

Et nous te prions, avant tout, pour ton peuple bien-aimé,
pour tous ces humains au Proche-Orient qui attendent la paix,
qui cherchent comment sortir de la haine et de la méfiance,
de tout ce qui empêche la compréhension et la réconciliation.